René Xavier Prinet - Le Pique-nique


René-Xavier Prinet (1861-1946). Le Pique-nique. Huile sur toile, 1903. © Coll. Et cliché Musée des beaux-arts, Belfort

Les Prinet recevaient le mardi soir dans leur appartement du 5, rue du Boccador, à deux pas du théâtre des Champs-Élysées. Chaque semaine, ponctuels, on voyait arriver les couples Aman-Jean, Ménard, Simon, Dauchez et Desvallières, tous peintres et amis. Dans le vaste atelier de René Prinet, les hommes s’amusaient des derniers potins sur leurs confrères ou sur leurs hommes politiques, puis causaient peinture ou évoquaient mille souvenirs communs de leur jeunesse. Dans le petit salon adjacent, les femmes partageaient leurs confidences autour de la brillante Jeanne Prinet qui, sans enfant, régnait jalousement sur le petit clan.
Depuis la création du Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts en 1890, Prinet y exposait de gracieux intérieurs dévoilant toute une palette de scènes de la bourgeoisie : leçons de danse, de musique ; confidences de jeunes filles dans leur boudoir délicatement décoré… – autant de prétextes à de ravissants camaïeux de bruns légèrement rehaussés d’une note de couleur. Ces œuvres d’intimité témoignaient d’un goût parfait, mais laissaient peu présager de la véritable sensibilité de coloriste dont Prinet allait faire preuve dans les décennies à venir, devant le décor de la plage de Cabourg.
Le Pique-nique fait le lien entre les deux sources d’inspiration du peintre en décrivant une scène qui a pu être réelle ou imaginée : le petit clan en plein déjeuner champêtre sur la pelouse du château de Bénouville, en Normandie.